Ma Passion des Locomotives à Vapeur Vive



Passionné par les locomotives et amoureux inconditionnel des Machines à Vapeur, j'ai trouvé en ces dernières un accès personnel à la quatrième dimension: la machine à remonter le temps par le modélisme.

C'est en effet depuis la maison de mon enfance, proche du dépôt d'Alès en Cévennes, que j'observais le ballet incessant de ces monstres de mécanique vivante, allant jusqu'à m'immerger dans leur panache de fumée à la faveur d'une passerelle de traverse des voies.

 

Après une longue accumulation de documentation et de bouquins, de visites à Mulhouse au Musée du Chemin de Fer, de pistage acharné des dernières survivantes, j'ai décidé de me lancer dans la réalisation de modèles de locomotives fonctionnant à la vapeur vive.

 

Oui, mais voilà, ma formation personnelle ne m'a pas préparé aux joies de l'usinage et à l'utilisation des machines outils ! Alors, tout à commencé par l'investissement d'un tour et d'une colonne de fraisage que j'ai du un peu martyriser au début en raison de mon ignorance sur l'art de faire des copeaux. L'expérience aidant, j'ai acquis une maîtrise certaine de ces "bêtes" en réussissant la réalisation de pièces conformes aux côtes des plans. Puis, j’ai du également me familiariser avec les techniques du soudage, de la brasure, du rivetage, de la lime et du pliage de tôles.

 

A l'issue de cette période d'apprentissage, j'ai considéré qu'il fallait passer à l'acte et se jeter à l'eau !

 

Tout d'abord, il fallait opter pour le choix d'une échelle de réduction compatible avec la place disponible dans mon appartement et les lois de la thermodynamique... En effet, la molécule d'eau ne peut pas être réduite… mon choix s'est porté sur deux échelles voisine : le 1/20ième et la très british échelle du 1/22ième.

 

Il me restait à sélectionner les locomotives à réaliser, et là, c'est le coup de cœur qui a joué, avec tout d'abord l'élégante Pacific 231 PLM (locomotive de vitesse avec ses immenses roues qui sillonnait la vallée du Rhône, symbole de la route des vacances, "Nationale 7" ferroviaire) et ensuite, la mythique Mikado 141R (livrée par les Américains et les Canadiens à l'issue de la Deuxième Guerre Mondiale, dans le cadre du Plan Marshall. Construite en 1323 exemplaires, c'est elle qui a permis le redémarrage de notre économie !)


A partir de plans récupérés auprès de la SNCF, j'ai refait des liasses de plans adaptés à l'échelle de réduction. Si dans cette logique, le châssis, les roues et la chaudière ne posent pas trop de problèmes, il n'en est pas de même pour certaines pièces dont la modélisation ne peut pas se traiter par une simple réduction. Par exemple, le sifflet - genre de tuyau d'orgue - va donner un son crédible si la longueur du tuyau est du même ordre que celle du vrai sifflet. Alors… il va falloir tricher un peu… et un tel sifflet sera usiné avec une échelle très peu réduite puis caché entre les longerons du châssis, ainsi l'illusion sonore est parfaite !

Une démarche identique sera conduite pour la réalisation des vannes, des robinets, des soupapes, des pompes et des manomètres.


Ensuite, il faut tenir compte des problèmes thermodynamiques, avec une gestion des pressions et des températures.

La pression nominale de la chaudière en fonctionnement est de 6 bars, ce qui suppose une mise en test au double de cette valeur.

La dilatation longitudinale de la chaudière doit être gérée par sa fixation rigide à l'avant au niveau de l'échappement, tandis que l'arrière reste flottant sur une queue d'aronde. Enfin, il faut isoler thermiquement tout ça pour éviter les déperditions de chaleur.

 

La phase suivante c'est l'approvisionnement des métaux, barres et rondins de laiton et de bronze, tôles de laiton et d'inox, tubes et tuyaux de cuivre, enfin assortiment de visserie.

 

L'atelier étant prêt, la matière première approvisionnée et les plans terminés, je suis passé à l'usinage des pièces, et là, il y a de quoi s'occuper, surtout avec ma doctrine personnelle qui consiste à refaire une pièce autant de fois qu'il faudra pour arriver à la perfection. Comme dans bien des domaines, c'est l'élément le moins performant qui limite le résultat final de l'ensemble.

 

L'usinage du châssis, avec les boites à essieux et les suspensions à ressorts ne posent pas de problème majeur, et convient très bien pour un galop d'essai à cette discipline.


Là, où ça se complique un peu, c'est pour la réalisation des roues à rayon, bonjour la lime et la patience, surtout qu'il faut les faire toutes une à une individuellement, le copié-collé n'existe pas chez le bricoleur mécanicien.

 

Autre point délicat, l'usinage des pistons et l'alésage des cylindres, cette échelle ne permet pas l'utilisation de segments, l'étanchéité est gérée par la précision de l'usinage... ça flirte avec le micron, tiens, on se rapproche de l'optique. Inutile de préciser que c'est là où j'ai recommencé le plus de fois avant d'arriver à la perfection nécessaire au bon fonctionnement du moteur.

 

Vient ensuite la réalisation de l'embiellage, petite merveille de cinématique dans laquelle les ingénieurs mécaniciens de l'époque ont investit toute leur créativité pour gérer des asservissements dignes de ce qu'on pourrait faire de mieux avec les ordinateurs actuels. Là aussi, il faut une précision extrême, sinon gare aux points durs, et au roulement chaotique.

 

Il est alors possible de tester la mécanique de roulement une fois le châssis assemblé avec les roues, les cylindres et l'embiellage. Il suffit pour cela d'un compresseur connecté au niveau de l'admission dans les cylindres.


Le modèle, doit tourner régulièrement et sans saccades en marche avant, et en marche arrière avec le bruit caractéristique et régulier de l'échappement.

 

Ce premier ensemble validé, il sera coiffé par la chaudière avec son foyer.

J'ai affecté la Pacific d'une chaudière en cuivre brasée à l'argent, la grille du foyer étant en inox réfractaire.

La 141R sera dotée d'une chaudière tout inox brasé.


La chaudière est munie de tous ses accessoires, dôme de prise de vapeur pour l'admission  avec régulateur, soupapes tarées de sécurité, visualisation du niveau d'eau, manomètres, prises de vapeur de servitudes, échappement, et éléments de surchauffe.


La locomotive prend alors sa forme définitive, avec, à l'avant la boite à fumée, surmontée de la cheminée, et à l'arrière l'abri de conduite.

Les pompes à graisse, la pompe à eau, les crochets d'attelages et les tampons, viennent compléter la machine. Il ne reste plus qu'à ajouter quelques éléments de décoration.

 

La réalisation du tender à charbon et eau devient une formalité quand on vient de passer les étapes précédentes.

 

C'est maintenant que la "machine à remonter le temps" va prendre son essor. Il faut alors obtenir de la pression (6 bars), c'est à dire de l'énergie motrice, à partir de deux éléments naturels: l'eau et le charbon.

C'est avec 4 litres d'eau dans le tender, 2 litres dans la chaudière et 700gr de charbon anthracite dans le foyer que la machine est mise en chauffe. Cette préparation minutieuse nécessite une bonne heure de patience.

 

Avec une longueur totale de 1,25 m, et un écartement des rails de 74mm, le réalisme de la marche d'un modèle au 1/20 est surprenant, au visible, à l'audible, et à l'olfactif.


Mes Locomotives sont munies de radio-commandes afin de contrôler leur marche sur un circuit.

La puissance peut atteindre 1/4 de cheval vapeur, permettant de remorquer une charge de wagons de 120 kilos.


Ces machines brûlent du charbon en libérant du CO2, élément indispensable à la végétation pour assurer la pérennité du cycle du carbone. J'entends déjà à ce sujet l'indignation des écolos bien pensant, oui, vous savez, ceux qui balancent leurs déchets sur la voie publique.

L’écologie, la vraie, c’est une affaire de responsabilisation individuelle et collective, basée sur le bon sens, l’éducation et surtout sur les vérifications scientifiques des concepts à mettre en œuvre.

Alors, au lieu de tant se préoccuper de la planète que nous allons laisser à nos enfants, il serait temps de s’interroger au sujet des enfants que nous allons laisser à notre planète.

Moi, aigris ?… Pas du tout, simplement je constate.

 

Voilà pourquoi, je retourne à mes Machines qui me font rêver et remonter le temps.